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après deux mois d’absence, de venir jouer à l’amoureux.

— Flava, je ne joue rien ; je suis pour toi ce que j’ai toujours été. J’accepte tes reproches, je sais qu’en apparence je puis en mériter ; je suis peu assidu, il est vrai, mais tu règnes en mon cœur toujours ; tu règnes comme la patrie dans le cœur d’un proscrit ; tu règnes comme la vie dans le cœur d’un condamné. L’absence ne détruit pas l’amour, tu le sais. Je suis peu assidu, c’est vrai, que veux-tu que je vienne faire ici plus souvent ? Souffrir !… Toujours gardée à vue, comme une criminelle d’État, je ne puis seulement te presser la main, te dire un mot bas à l’oreille ; à peine si nos regards peuvent s’entendre ; cela me fait trop de mal, je ne puis le supporter ! Que de fois j’ai été tenté de frapper ton père, tes geôliers, de te prendre le bras et de te dire fuyons ! Ah ! si tu étais libre, ou si du moins nous pouvions nous livrer à de douces causeries, tu ne te plaindrais pas de l’infréquence de mes visites.

— Mais, qu’importe !… puisque ta vue seule me remet tant de courage au cœur. Ah ! c’est cruel, Champavert, de haïr ainsi une femme, et