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cadavre de jeune femme, arrêté par ses longs cheveux roux sur les rochers et les brisants, qui, en cet endroit, effleurent la surface de la Saône.

Jean Ponthu, le batelier, le recueillit dans sa barque et l’apporta sur le rivage au lieu nommé la Mort qui trompe ; le peuple s’ameuta à l’entour, tout plein de regrets ; il contemplait sa fatale beauté ; ses deux petites mains, meurtries, étaient liées sur le dos par une grosse corde.

Tout à coup, une voix, partie de la foule, cria : — Ne la reconnaissez-vous pas ? c’est Dina, la rousse ! Dina la belle juive ! la fille de Judas, le lapidaire, qui demeure là derrière, dans la Juiverie.


Toute la journée, il y eut foule dans la maison d’Israël Judas. Dina était exposée sur son lit, vêtue de ses vêtements de fête, et parée de ses joyaux, suivant le rituel hébraïque. Léa, sa pauvre mère, mourante, était assise au pied du lit, jetant des hurlements ; Judas, accoudé dans son fauteuil, son pourpoint lacéré et la tête couverte de cendres, muet, dévorait sa douleur.

Un rabbin priait.