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êtes charmante, noble dame ! que je vous aime ! Quelle joie de vous presser dans mes bras ! moi, Jean Ponthu, un passeur, un manant, une noble dame !… Oh ! si vous vouliez m’aimer !… Voyons, les belles bagues ! jolies et de prix, n’est-ce pas ? même main que ma Marion. Béni soit Dieu ! laissez donc faire, je lui offrirai de votre part…

— Vous me déchirez les doigts !…

— Souvent, quand j’étais soldat, et la nuit en védette, je réfléchissais, et je me disais : — Nous autres paysans, nos sœurs, nos filles et nos femmes sont toujours pour MM. les seigneurs, les nobles, les bourgeois ; ce sont eux qui violentent nos amies, et nous autres bétas nous ne faisons jamais rien à leurs femmes, à leurs filles ; cela n’est pas juste. Je me disais aussi : — Pourquoi donc nous autres que nous sommes pauvres, et eux autres sont-ils riches ?… Ah ! par exemple, cela, je n’ai jamais pu me l’expliquer ; ce n’est pas juste, est-ce pas ? Pour former un garçon et le rendre malin, il n’y a tel que la guerre.

Le charmant collier, les gentilles perles fines ! Ma Marion a juste le même cou que vous. Béni soit Dieu ! cela se trouve bien. Je lui offrirai de votre part, est-ce pas ?…