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Elle est belle pourtant : regarde l’horizon
Qui s’ouvre devant nous, éclatant de lumières…
Va, nous saurons franchir ces débiles barrières
Qui nous tiennent comme en prison.

Qu’importe un peu de peine au matin de la vie,
Ou le nuage obscur errant à ton zénith ?
Le nom qu’on a gravé sur le rude granit
            Échappe à l’ongle de l’envie.

Et quand viendra le soir, nous aurons le repos,
Nous trouverons la gloire au bout de la carrière,
Et l’amour sera là, séduisante chimère !
            Versant son baume sur nos maux.

Regarde autour de nous ces masses immobiles
Ignorant de l’amour les doux embrassements,
Ou de l’ambition les beaux emportements,
            Êtres incomplets et débiles !

N’ont-ils pas plus que nous droit d’accuser le ciel,
Ceux qui, jetés tous nus sur cette route aride,
De leurs lèvres de feu, pressent la coupe vide,
            Ou n’y rencontrent que du fiel ?

Et toi, tu te plaindrais (quand, tout plein de jeunesse,
Tu bondis libre et fort comme un brave coursier),
De quelques jours de deuil que te font oublier
            Les doux baisers d’une maîtresse.