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— Je souffrais enfermée, disait-elle, j’ai été voir le ciel, je me sens mieux. —

À cette époque de l’année où tout renaît, où tout s’avive, où l’être le plus froid se sent remué, où l’on éprouve un besoin impérieux d’épanchements, où le plus mysantrope se dépouille de sa haine et de son austérité et voudrait faire de la courtoisie ; à cette époque, où un sentiment sympathique nous incline à l’amour, à cet amour jeune qui tourmente même ceux qui l’ignorent et les jette dans le malaise et dans la langueur ; à cette époque, Dina qui, depuis une année, avait auprès d’elle, à ses genoux, un ami, un compagnon qui l’obombrait sous ses ailes, avec lequel elle passait ses jours dans des conversations qui la ravissaient, dans des lectures de la Bible, dans de saints aveux, dans des rêves illusoires ; Dina, soumise et confiante, habituée à ne plus penser, à ne plus songer que par l’homme dont elle aimait la volonté, dont le contact lui avait épanoui l’âme et dont elle avait plus besoin que jamais ; Dina se trouvait fatalement isolée, le bras qui la soutenait, la main qui la dirigeait, la bouche qui lui soufflait la volonté, l’amour, la haine, tout lui manquait ;