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fus involontairement attiré par le charme secret de l’harmonie, et je tombai, éveillé en sursaut, au milieu de la foule réunie au Boulingrin, où s’assemblaient, tous les soirs, l’élite de la ville, les ménétriers, joueurs de luth, de mandoline, de vielle, les sonneurs de trompe et de buccine, pour faire des concerts de voix et d’instruments. Que de soirées délicieuses j’y passai sous un firmament outremer moucheté d’étoiles, à la brise fraîche et sereine qui jouait parfumée et mélodieuse sur nos têtes, bercé, ravi par des chœurs de voix humaines et de musique céleste ! Oh ! surtout, quel transport ! alors qu’on entonnait quelque chant glorieux, quelque romance en suave langue provençale ; ou quand, dans les solennités religieuses, les jours saints, on chantait de la musique sacrée, ces hymnes spirituelles, ces proses graves, funèbres, ces psaumes majestueux, ce Stabat langoureux et sonore, ce sépulcral Dies irae, qui, quoique veufs des orgues et du mystère de la cathédrale, nous faisaient frissonner d’épouvante, comme la contemplation solitaire et nocturne de l’immensité.

Ainsi que dans un carrousel, les damoiselles et les dames étaient assises en cercle aux places