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Nous étions assis près d’une croisée et nous devisions, quand nous entendîmes un tumulte lointain et des décharges de mousquets. Nous nous levâmes et nous penchant à la fenêtre nous vîmes Reeder et Sam, nos héros, marchant triomphalement, portant, au bout d’une pique, la tête et la main du malheureux Jack. Ils étaient suivis d’un concours formidable surtout de cudjos de Maroon town, vêtus d’une braye et d’une veste de grosse toile que le gouvernement leur donnait chaque année, ainsi qu’un fusil tous les cinq ans, en paiement des services qu’ils rendaient à la colonie. Ces braves gens faisaient presque la police de l’île comme une maréchaussée ; ils arrêtaient et ramenaient les nègres fugitifs, les vagabonds qui se retiraient dans les montagnes et les prisonniers de guerre échappés de Port-Royal. C’était un ramassis d’hommes de toute origine, de vrais Klèphtes, avec lesquels les Anglais avaient été forcés de faire une capitulation toute à leur avantage, n’ayant jamais pu les dompter. Le surnom de cudjos leur venait du nom d’un de leurs vaillants capitaines. Ne pouvant plus guerroyer, ils s’étaient adonnés à l’éducation des bestiaux, qu’ils