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ramassis de toutes les races humaines, manquent de cohésion spirituelle. Les Américains ont perdu la civilisation originelle des puritains anglo-saxons irrémédiablement noyés sous les flots d’une immigration hétérogène, et n’ont d’idées communes qu’en ce qui concerne le profit. C’est là une des raisons psychologiques pour lesquelles, depuis une cinquantaine d’années, leur politique est toute d’inspiration économique.

Depuis la guerre de Cuba, les États-Unis sont menés par les intérêts d’affaires et dominés par les représentants de ces intérêts : les « capitaine d’industrie », les trusts, les monopoles, qui se sont arrogé le droit de « contrôler » la production, les salaires et les prix, — toute la vie matérielle du pays — et y sont parvenus en « contrôlant » et le législateur, et les deux grands partis démocrate et républicain, et l’action gouvernementale. Conséquence fatale de la formation ethnique du pays telle qu’elle s’est effectuée depuis 1880 : tandis que les premiers colons, tous d’origine nordique, véritables pionniers, possédaient et maintenaient depuis le xviiie siècle un idéal de civilisation, les nouveaux venus, — en grande majorité latins du sud européen, orientaux et juifs — mus par l’esprit de lucre, ont submergé leurs précurseurs et ont fait des États-Unis ce qu’André Siegfried a justement appelé une société grégaire de rendement.

Qui méconnaît cette vérité ne comprendra jamais rien à l’Amérique contemporaine, dont toutes les initiatives sont inspirées et dominées par l’orgueil de demeurer, face au reste du monde, le pays au STANDARD OF LIVING le plus élevé.

Tel est l’« idéal » supérieur auquel s’est arrêté un peuple, pourtant vigoureux, courbé sous la férule du grand capitalisme. Des progrès mécaniques, il a été tiré la quintessence. Il a exalté la technique, mais, de cet auxiliaire du perfectionnement humain, il a fait un instrument de lucre. Il n’apprécie une invention qu’en raison de sa valeur marchande et de sa rentabilité ; sa portée morale lui échappe. L’idée de profit le tient, « faire de l’argent » l’obsède : il s’y épuise, et s’y est déséquilibré.

Conséquence, écrit le Dr Alexis Carrel, notre illustre compatriote, c’est qu’« il y a aux États-Unis des quantités de faibles d’esprit et d’idiots moraux. Dans les hôpitaux, le nombre des fous dépasse celui de tous les autres malades réunis. D’autre part, la criminalité augmente. Les statistiques de J. Edgar Hoover montrent que les États-Unis contiennent actuellement 4 millions 760.000 criminels. Le ton de notre civilisation lui est donné à la fois par la faiblesse d’esprit et la criminalité. Nous ne devons pas oublier qu’un président du Stock-Exchange de New-York a été condamné pour vol, qu’un éminent juge fédéral a été reconnu coupable d’avoir vendu ses verdicts, qu’un président d’université est en prison. En même temps, les individus normaux sont accablés par le poids de ceux qui sont incapables de s’adapter à la vie. La majorité de la population vit du travail de la minorité. Car il y a peut-être aux États-Unis 30 ou 40 millions d’inadaptés ou d’inadaptables. En dépit des sommes gigantesques dépensées par le gouvernement, la crise économique continue. Il est évident que

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