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CHARLOT S’AMUSE

les rayons de soleil dans son éblouissant ovale en tôle.

Soudain, un frémissement courut dans la foule, et le silence se fit aussitôt.

— Le voilà…

Le cercueil apparaissait maintenant, appuyé sur la barre d’appui, le haut reposant encore sur le parquet de la chambre ; presque debout et nu. Dans l’aveuglante lumière, le bois blanchissait et les veines pâles du sapin le marbraient de filets roses. Lentement, les deux ouvriers l’entouraient de cordes, le retournant pour le ficeler, comme font les layetiers d’une caisse, s’assurant en tirant chacun à soi que l’amarre ne glisserait pas sur les planches polies et que les nœuds ne céderaient point sous le poids. Alors, se penchant vers la cour, ils crièrent gare, invitant posément du geste les spectateurs à s’écarter, puis, d’un vigoureux effort, ils soulevèrent la bière, et la mirent en équilibre sur la balustrade. Derrière eux, des voisins s’arc-boutaient retenant les câbles.

— Attention à le filer en douceur ! leur dit un des employés en se retournant… Allez ! hop ! allez-y…

Les hommes lâchèrent un peu de corde, tranquillement, sans secousses, comme des matelots descendant une embarcation de ses