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CHARLOT S’AMUSE

Dès lors, la vie était devenue toute autre. La fille se désolait, avec une continuelle révolte contre cette maternité qu’elle regardait comme un châtiment, et dont elle ne pouvait se décider à prendre son parti, écoulant sa colère rageuse en des récriminations quotidiennes. Il aurait fallu qu’au premier jour, Charlot, usant, de l’influence qu’il avait sur elle, lui fit entendre raison et la raccommodât avec l’idée d’avoir un enfant, dont la venue ne fanerait pas, comme elle en avait peur, sa beauté de fille grasse. Mais il n’eût que des banalités à lui dire, se sentant gêné, lui-même dans son égoïsme, et devinant que son amour allait souffrir de cette grossesse. Fanny n’était pas au fond mauvaise, elle se serait résignée, et bien vite elle aurait aimé son enfant, si son amant s’était réjoui d’être père ; mais, en le voyant, au contraire accueillir avec indifférence la nouvelle, elle s’imagina qu’il était mécontent et qu’il craignait de la voir s’enlaidir. Puis, elle eut peur qu’il l’a trompât et sa mauvaise humeur s’en accrut.

Pourtant, pour être moins calme que jadis, le ménage conserva quelque temps encore toutes les apparences du bonheur. La nuit, Charlot oubliait les scènes que Fanny lui avait faites durant le jour, et celle-ci, elle-même,