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CHARLOT S’AMUSE

femme pâle que deux infirmières soutenaient pour la conduire dans un fauteuil, devant le public, au milieu de l’estrade, et Charlot regardait avec surprise cette misérable qui, l’air indifférent, se retroussait pour permettre au docteur de montrer le tremblotement nerveux de sa jambe gauche.

Après celle-là, une douzaine d’autres vinrent, l’une après l’autre, s’asseoir sur la scène, toutes présentant des cas différents, curieusement bizarres. La dernière avait un bandeau sur la figure ; à peine lui voyait-on un œil. Elle semblait vieille et jouait avec sa tabatière, tout en dandinant ses épaules. Charlot, écœuré, la regarda à peine, et se mit à écouter la biographie de la malheureuse, que faisait le professeur : elle était à la Salpétrière depuis sept ans. La police l’avait ramassée un jour aux Champs-Élysées, sur un banc, et on n’avait pu savoir son nom véritable que longtemps après, car elle n’avouait au début qu’une partie de son histoire. Elle était un exemple des troubles morbides que transmet l’hérédité, son père étant mort du delirium tremens, et sa mère, qui était épileptique, s’étant volontairement noyée à l’hospice. Son cas était très curieux. Lorsqu’après la crise de la ménopause, elle s’était décidée à parler, on avait pu reconstituer