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CHARLOT S’AMUSE

les maisons, la bouche sèche, l’œil mort, voyant rouge en dedans, mais l’air placide. Même il ricanait en approchant de la maison, et en saluant les voisines qu’il rencontra sur le quai, il s’imaginait ce que serait leur stupéfaction tout à l’heure.

— Les imbéciles, pensait-il, qui ne se doutent point de ce que je vais faire !

Et, serrant le manche de son canif, il entra.

Tout de suite, il eut une désillusion. La cour était vide, les fillettes qui y jouaient d’ordinaire étaient absentes. Une rage empoigna le misérable. Cependant, il se composa un visage et, l’air naturel, en prenant sa clé, il demanda au concierge où étaient les enfants. L’Auvergnat répondit qu’une de leurs petites camarades d’école était morte et qu’elles étaient à l’enterrement ; mais comme Charlot remontait chez lui, les dents serrées, il rencontra, devant sa porte, la fille de sa voisine la blanchisseuse, une gamine de quatorze ans. Elle était trop grande, trop femme ; il n’avait point songé à elle. Il s’effaça pour la laisser descendre.

— Pardon, m’sieu ! fit-elle, et elle s’en alla lentement, le frôlant de ses jupes, et lui coulant au passage un regard vicieux de fille précoce.