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CHARLOT S’AMUSE

et se réjouir « parce que les macchabées, n’ayant point besoin de tisane comme ces sacrés malades, le laisseraient dormir », Charlot conçut le rêve ignoble d’aller la nuit au milieu des morts polluer leur chair froide. Ce rêve l’obséda jusqu’à l’aube. Quand le jour parut, il se secoua, navré de son érotique délire, et se refusant à croire ses souvenirs.

Enfin, un matin, les médecins de Saint-Mandrier tinrent conseil autour de son lit, et tombèrent d’accord sur la nécessité de réformer le misérable, pour qu’il pût assouvir ses sens égarés par l’accomplissement des besoins légitimes.

Huit jours après, le jeune soldat avait en poche son congé de réforme, et, grâce à la générosité de son ami Jolly, pouvait passer chez Camélia une nuit bienheureuse.

Quand il rentra à la caserne, on l’appela chez son sergent-major pour lui remettre sa feuille de route :

— Où vous retirez-vous ? lui demanda le fourrier en achevant de remplir l’imprimé.

Il rougit et balbutia. Son abrutissement était tel qu’il n’avait point encore réfléchi à ce qu’il ferait une fois sorti du régiment. Retourner à Saint-Dié ? mieux valait la mort. Il songea alors à Paris, aux ressources que la grande