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CHARLOT S’AMUSE

Il ressentit comme des piqûres d’aiguille sur le front avec une affre pesante. Ce fut spontané, irréfléchi, machinal, instinctif. Il revint à lui, sur le lit de son sergent-major, tressaillant encore à la douceur mourante et spasmodique des caresses retrouvées, de la volupté ancienne reconquise. Hagard, il s’imaginait mal comment il était venu là depuis la fenêtre, comment cela s’était fait. Ses oreilles bourdonnaient, son cœur battait de grands coups anxieux dans sa poitrine et, haletant, les yeux papillotant, il s’étonnait de l’obscurité brusquement venue dans la chambre.

Peu à peu, les grondements de son sang s’apaisèrent et son souffle se refit régulier. Il avait rêvé pour sûr : il faisait jour. Titubant, il sauta à bas du lit et courut à la fenêtre, soulagé à revoir le tableau accoutumé et, en bas, la chaussée blanche et les broussailles vertes que, rapetissés par la hauteur, les dômes des platanes entassaient en rond au bord du trottoir. Il voulait s’imaginer qu’il n’avait point quitté cette croisée, discutant avec lui-même, et accumulant ces raisonnements illogiques et obstinés de l’ivrogne, qui se tenant encore debout, lutte avec son ivresse et, se sentant vaincu, s’entête à la nier.

Tout à coup, il eut la nette perception de sa