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CHARLOT S’AMUSE

vital. Chacune des trois maladies qu’il avait faites en marquait les étranges étapes et permettait au malheureux d’en mesurer nettement les ravages. Le brave docteur Joly n’y comprenait rien, parlant vaguement de névrose, de croissance et d’une affection cardiaque que l’épilepsie de la mère aurait sans doute léguée à l’enfant. Aussi l’accablait-il, naïvement, de toniques reconstituants, de ferrugineux, de bromure de potassium et de sirop de pointes d’asperge.

À vrai dire, les ruses du malade rendaient presque concevables l’erreur et l’hésitation du vieux praticien. Charlot se refusait à tout examen, permettant à peine au docteur de l’ausculter, et, sur les conseils de Lucien, dissimulant tous les symptômes qui auraient pu trahir le monstrueux secret de sa perversion génésique. Son camarade lui soufflait d’adroites réponses à toutes les questions, et consultait, pour mieux rendre introuvable au médecin le véritable diagnostic, des ouvrages de vulgarisation médicale qu’il volait dans la bibliothèque de son oncle. Il prit là un opuscule sur les Maladies nerveuses que Charlot dévora en cachette, et grâce auquel il put égarer à coup sûr l’honnête M. Joly, et détourner ses soupçons.