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CHARLOT S’AMUSE

Charlot eut un faible sourire. La bonne figure joyeuse du docteur l’égayait. Se rappelant encore mal ce qui lui était arrivé, il regardait autour de lui, délicieusement brisé, troublé comme après un long sommeil plein de rêves. Une exquise sensation de retour à la vie le remplissait d’une torpeur attendrie, et il demeurait immobile, noyant sa pâleur dans la blancheur des coussins, ouvrant larges ses yeux, dilatant ses narines. Justement une nappe de soleil pénétrait dans la chambre, mettant sur le papier de la muraille, dans la ruelle, le rose reflet de l’édredon rouge rejeté au pied du lit. Et de la cour des bruits montaient, très doux, en un bourdonnement de ruche qui partait des classes du rez-de-chaussée. L’Angelus tintait à la cathédrale et les gamins en bas répondaient en fredon :

— Sainte-Ma-rie, mè-re de Dieu, pri-ez pour nous, pau-vres pé-cheurs…

Les syllabes scandées en un monotone refrain s’envolaient, chantantes, dans l’accompagnement de la cloche. Mais la nouvelle s’était répandue par l’école que le petit Parisien allait mieux et que le docteur, à présent, répondait de lui. Isidore accourut et, à sa suite, tous les frères. Ils s’approchaient de la couchette du malade et le complimentaient, l’air joyeux,