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CHARLOT S’AMUSE

n’avaient pas conscience, une tendresse amollissante se mêlait à présent qui poétisait leur immonde amour. L’enfant adorait son maître comme il avait adoré son père, comme il aurait adoré sa mère, si celle-ci le lui avait permis. Frère Origène était un grand frère, un bon ami et il se confiait à lui ingénûment, lui disant toutes ses pensées, lui ouvrant sa vie, câlin, avec de charmants enfantillages. Sa nature féminine remportait. À l’arrivée de son professeur, il avait d’étranges coquetteries d’une lascivité qui s’ignorait, d’amoureuses querelles, des refus qui le livraient, tout un manège de fillette qui chatouillait, à défaut des sens, l’imagination blasée de son ami. Puis, quand, sous les mortels attouchements, il s’était pâmé, quand, à bout de forces, haletant, il avait refermé son vêtement de nuit, il redevenait, sans transition, le moutard affectueux, chastement caressant qu’il était.

Naïvement, il s’imaginait du reste qu’elles étaient naturelles les manœuvres du frère, et communes entre tous ceux qui s’aimaient, — prémisses ou corollaire des amitiés profondes, comme celles dont la Morale en action lui rapportait les exemples fameux. Même, il le disait à Origène, souriant tout heureux, et lui citait ses premières et impressionnantes lectures