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Le gondolier Pietro reprit ses rames, nagea vers la ville ; — son visage exprimoit une angoisse douloureuse : aussi les premiers mouvemens de sa manœuvre furent-ils exécutés avec mollesse et distraction. Cet état d’abattement dura peu, toutefois, car après quelques instans, comme si une idée pleine de bonnes promesses eût illuminé son cerveau, il releva sa tête large et grisonnante ; il se redressa sur son banc, serra ses doigts sur ses nageoires, roidit ses bras nerveux ; la gondole traça, sur les eaux du canal, un sillage aigu et profond, elle aborda le grand quai avec la rapidité du vol d’un oiseau, et le rangea de manière à tressaillir sur le flot, car Pietro, avec cette adresse qui le rendoit si célèbre dans le port de Molamocco, harponna intrépidement la dalle avec son épieu, au plus fort de sa course, et s’arrêta court au point de débarquement.

Une heure après, descendu dans le Rialto, il entroit dans la maison du potier d’étain, Buvarini, à l’enseigne de Saint-Théodore.

— Au gondolier privé, salut ! dit gaiement