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reillement m’ont bien contristé ! mais me souviens, puisque c’est l’heure des souvenirs, me souviens, dis-je, que certain jour me vint horrifique et déloyale pensée !…

— À vous ? s’écria Anne de Bretagne avec ingénuité.

— C’étoit à Saint-Denis, et le jour de votre sacre… il me fallut long-temps soutenir au-dessus de votre tête cette couronne de France, trop grande et trop lourde pour votre jeune chef… Dieu m’en octroye le pardon, comme me l’a promis mon confesseur… Sentant frémir sous mes doigts ce joyau royal qui devenoit vôtre, admirant sous mon regard si jolie dame agenouillée, inclinée devant Dieu et la Vierge, et offrant aux regards de mon esprit l’albâtre de ses épaules et de son sein, les délicats et gracieux contours de ses formes… je voulus, oui, je voulus raffermir mes doigts qui trembloient, élever mes mains, abaissées, à hauteur de ma tête, et me couvrir félon et usurpateur de cette couronne dont Charles VIII vous dotoit…