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dis que j’impose à ma jeunesse d’étouffer tout ce qu’il est dans sa condition de connoître et de ressentir de plaisirs et d’amour, qui sait si la mort n’est pas là, dans un coin de ma chambre, railleuse et perfide, prête à me saisir au milieu de ma veillée studieuse ? Qui sait si, tandis que je suis en marche pour l’exploration, une volonté qui me laissera l’existence n’éteindra pas tout à coup ce flambeau qui en est l’inspiration ? Alors égaré, mais lancé dans ma course, j’irai briser mon front sur le bronze de quelque porte d’idée, et relancé en arrière, mutilé, je reparoîtrai dans la vie commune pour y subir les risées du vulgaire imbécile ! mille chances pour une telle fin, une seule pour arriver, maître de ma raison, à cet orbe de feu que je poursuis !

J’y renonce ! je me livre au présent, n’enviant d’autre lendemain que celui qui me laissera le pouvoir de mes sens et le trésor de mon amour ! — Il éleva la lettre, la couvrit de ses baisers. — Laure de la Viloutrelle, tu l’emportes ! je m’indigne de ce vague où se précipitoit ma raison, je m’abandonne à la réalité