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ceux qui cuisent la pâte, ceux qui versent dans le four les cascades de charbon, ceux qui défournent les briques. Ceux-ci, il ne peut s’empêcher de les regarder avec admiration, mais avec terreur aussi. Il a lu jadis dans un conte l’histoire d’hommes qui couraient dans les flammes vertes et narguaient les démons. Les défourneurs leur ressemblent, ils marchent vers la boule de feu, ils se penchent dans le four et saisissent les briques brûlantes avec les gestes des pompiers qui sauvent les décombres. Treize cents degrés de chaleur précipitent sur leur corps une masse de plomb. Quelquefois, n’y tenant plus, ils jettent les sacs qui enveloppent leur peau et donnent directement au feu leurs corps mordus par des brûlures, sabrés d’estafilades, troués par des ecchymoses. D’autres fois, les manouvriers prennent la fuite vers la cuve, enlèvent leurs sacs, les trempent dans l’eau froide, s’en revêtent ensuite et plongent dans le foyer, tandis que l’eau dégouline sur leurs poitrines et leurs épaules pour se vaporiser vite.