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n’a-t’on pas du hibou que la nuit
La lanterne à la main elle-méme conduit.
Par un cri menaçant, par un battement d’aîle,
Il fait fuïr trois heros, il éteind leur chandelle,
Et si par la discorde ils n’étoient reünis
Leurs cœurs étoient glacez, et leurs exploits finis.

Il fait avec prudence assembler le chapitre
Pour oser renverser ce terrible pupitre,
Et cet autheur le dit avec tant d’agrémens,
Les chanoines ont tous de si grands sentimens,
On y cite si bien l’alcoran et la bible
Que l’assemblée y trouve un plaisir tres-sensible.
Que dirai-je de plus, l’auditoire aplaudit
À tous ces longs discours que nôtre autheur lui lit.
Chacun se plait d’oüir ses nouvelles deesses,
Ses merveilleux heros charmez de leurs proüesses,
Et ces vers surprenans où le grand Lutrigot
Compare enfin Louis au fidelle Girot.
Ses pensers sont divins, s’il voit la nape mise,
Il en admire l’ordre, et reconnoît l’eglise,
Il tourne en jeux d’esprit le benedicat vos,
Les benedictions qu’on répand à grands flots,
Les offices divins, l’enbonpoint des chanoines,
Les prélats, les abbez, le vermillon des moines,
Et mille autres endroits chantez sur ce beau ton,
Qu’avec moins d’ornemens on préche à Charanton.
Mais rien ne touche plus cet illustre auditoire,
Rien ne couvre l’autheur d’une plus juste gloire,
Et ne releve tant l’histoire du lutrin,
Que le combat qu’on donne aux plaines de Barbin :
Jamais journée aussi ne fut plus éclatante.
Il la lit d’un air fier, et d’une voix tonnante ;
Il fait voir ses heros au combat acharnez,
Tous les coups sont toûjours ou receus, ou donnez,
Chaque livre jetté, fut-il sans couverture,
N’eût-il que six fueillets fait plus d’une blessure,