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Et ne disant rien moins que ce que dit son cœur
Il répond par ces mots au discours de l’autheur.
Inconcevable esprit que le ciel a fait naître
Pour être des sçavans le regent, et le maître,
Quel plaisir n’a-t’on pas de te voir en ce lieu,
Tu n’en sçaurois douter de la bouche d’un dieu.
On sçait que tes escrits, qu’on peut sans complaisance
Apeller l’elixir du sçavoir de la France,
Te rendent redoutable à tout le genre humain.
Quand le grand Lutrigot a la plume à la main,
Qu’il enfante les vers d’une docte satire,
Chacun cache les siens, et n’oseroit plus lire.

Tout Phoebus que je suis peut-être aurois-je peur,
S’il falloit en champ clos combatre un tel autheur.
Il est vrai que je vois qu’un jour certain poëte
Tâchera d’affoiblir le son de ta trompete ;
Mais cet esprit frivole, indiscret, et grossier,
Que l’Egypte a nourri durant un lustre entier,
Qui cherchoit le Parnasse au pied des piramides,
Ne fera contre toi que des vers insipides.
Un quatrain seul poussé de ta bruïante voix
Va d’abord l’étourdir, et le mettre aux abois.
Mais laissons tes hauts faits qu’à peine on pourra croire,
Nous en avons le fruit, toi seul en as la gloire.
Il est temps maintenant de combler nos desirs,
Tu peux donc nous donner de solides plaisirs,
En lisant ton lutrin tu vas te satisfaire,
Tu vas par tes beaux vers nous instruire, nous plaire,
Et toute l’assemblée a raison d’esperer
Que tu ne liras rien qu’on ne doive admirer.