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Il accorde aisément la plume avec l’épée.
Je ne veux point ici m’eriger en flateur,
Mais je puis assurer que nôtre brave autheur,
Voulant voir un combat avoit mis dans sa poche,
Pour le voir loin des coups des lunettes d’aproche ;
Jamais precaution ne fut plus à propos,
Et c’est marcher enfin sur les pas des heros.
Advoüons hardiment que ce rare genie
Conserve en sa conduite une grace infinie.
Que son discours au roi paroît noble et charmant !
Tout s’y voit bien placé, tout s’y dit galemment,
Oüi, tout ce qu’il adresse à ce vaillant monarque
D’une verve sublime est une illustre marque.
Est-il rien de si juste, et rien de si prudent
Que ce que dit Pirrhus avec son confident ?
Cet endroit est aimable autant qu’il le peut être,
Il me semble d’oüir Jodelet, et son maître.
Et qui sans nôtre autheur, auroit jamais pensé,
Qu’au lieu d’être vaillant Pirrhus fut insensé ?
Lutrigot n’aime point tous ces heros de guerre
Qui portent la terreur aux deux bouts de la terre,
À ces hardis desseins il n’aplaudit jamais,
Il n’admire en ses vers que les heros de paix,
Il veut qu’un roi s’engraisse, et que dans son empire
Il goûte un doux repos, et ne songe qu’à rire,
Et lui seul a trouvé mille fortes raisons
Pour loger Alexandre aux petites maisons.

J’admire ce beau conte assaisonné de l’huître,
Qu’il prend dans un autheur, n’importe en quel chapitre ;
Ce mets si delicat dont Lutrigot fit choix
Fut presenté jadis au plus puissant des rois ;
Mais l’huître n’étant pas d’un goût trop agreable
Il ne la servit plus qu’à la seconde table ;
Cependant ce ragoût, les amours de l’autheur,
Aiguise en le lisant l’appetit du lecteur.
Le passage du Rhin a produit des merveilles,
Et sur tout son grand vurts, mal né pour les oreilles,
Pour plaire également par la diversité
Il méle le mensonge avec la verité.