D’adjoûter quelque gloire à sa gloire immortelle,
On s’entretint long-temps des autheurs renommez,
Ils étoient par ce dieu plus ou moins estimez,
Des uns la lire plait, des autres la trompete,
Chaque muse à son tour loüoit quelque poëte ;
Par Terpsicore enfin Lutrigot fut vanté.
Quel autheur, disoit-elle, a plus d’habileté ?
Et qui plus hardiment peut se méler d’écrire.
Je sçai répond ce dieu qu’il sçait mordre, et médire.
Cependant repart-elle, en ce vaste univers,
Lui seul enseigne l’art de bien tourner un vers,
Comment on met d’accord la raison, et la rime,
Comment on doit passer du plaisant au sublime.
Qui suivra ses leçons peut avec seureté,
S’avancer sur ses pas vers l’immortalité,
Soit qu’il vueille briller dans un poëme epique,
Soit qu’il fasse l’essai du pompeux dramatique,
Soit qu’un galant ouvrage ait pour lui des appas,
Quoiqu’il vueille entreprendre il ne déplaira pas.
Apollon est surpris du discours de la muse.
Dans ce siecle éclairé rarement on s’abuse
Ma chere sœur, dit-il, et ce fameux autheur
N’est pas de ce grand art le pere, et l’inventeur,
Horace, Scaliger ont dit la méme chose,
Et c’est leurs sentimens que par tout il expose.
Pourquoi, s’il est sçavant, ne le pas témoigner
En pratiquant cet art qu’il pretend enseigner ?
Qu’avons-nous vû de lui conforme à ses maximes
D’un poëte sterile enfans illegitimes.
Il ne donne ses soins, il ne fait des efforts
Qu’à choquer les vivans, qu’à dechirer les morts,
On ne peut arrester ses noires médisances.
N’a-t’il pas osé dire en ses extravagances,
Qu’aprés avoir joüé tant d’autheurs differents
Phebus méme auroit peur s’il entroit sur les rangs
Que peut-t’il faire encor ? Que peut-il encor dire ?
Conseillez-lui, ma sœur, de quiter la satire,
Et s’il veut qu’on le croïe un autheur excellent,
Qu’il étale
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