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LE BHOUTAN INCONNU 83

et sa beauté, il fut placé au monastère de Raloung, où il étudia sous la direction du chef de la secte Droug-pa : Padma Karpo (le lotus blanc), dont la succession devait lui être réservée ; mais un rival l’emporta, et Shabdoung, humilié, s’exila au Bhoutan, où il pénétra en 1557, suivi d’une bande d’aventuriers tibétains qu’on évalue à 300 et qui devait être recrutée en majeure partie parmi ses anciens condisciples.

Entré par la passe de Ling-chi, au Nord-Ouest du pays, il s’établit dans la haute vallée du Thimbouk et, pendant les trente-cinq ans qu’il vécut encore, il fut continuellement occupé, à l’aide de ses partisans, à consolider et à étendre son pouvoir spirituel et temporel sur la région. C’est là qu’il fonda la secte des Droug-pa « moyens » ou « méridionaux » pour se dégager de l’influence de Raloung où gouvernait son rival ; celui-ci ne cessa d’ailleurs de lui susciter des obstacles, et à cinq ou six reprises des bandes tibétaines vinrent l’attaquer, mais furent chaque fois batlues et repoussées ou capturées en masse.

La renommée de l’aventurier, grâce au succès de ses armes et de son prosélytisme, s’était répandue tout au long des Himalayas : les princes du Ladakh recherchèrent son patronage[1], ceux du Koutch-Bihar et du Nepâl son amitié, de même que les Européens qui commençaient à apparaître aux Indes ; les textes indigènes parlent en effet des envoyés du Pardoukou (Portugal) qui lui auraient offert, avec des présents, leurs services, qui furent d’ailleurs déclinés.

Shabdoung, qui s’était attribué le titre hindou de

  1. J’en ai donné un exemple dans la Conquête du Petit-Tibet, p. 43.