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LE BHOUTAN INCONNU 81

passé par le Bhoutan (Waddell, Lamaism, p. 380-384).

D’ailleurs, ce qu’on rapporte du séjour qu’il y aurait fait a un caractère fortement légendaire : le pays, dit ce récit, appartenait alors aux rois de Sindhou et de Kempaloung ; le premier ayant perdu un de ses fils dans un combat contre le radja de Naboudara, qui régnait dans la plaine indienne, tomba dans un désespoir qui le menait à la mort, quand Padma Sambhava apparut à sa cour. Dans un combat contre les démons qui dura sept jours, le gourou réussit à les chasser et à rendre la santé au roi ; les marques de son corps restèrent visibles sur le rocher, et le bâton planté par lui devant la grotte où il s’était retiré se couvrit de feuilles comme celui de Tannhauser et devint un cyprès que M. While a vu près de Byagha dans la vallée du Poum-thang[1]. À la suite de ce prodige, Naboudara se convertit aussi au bouddhisme et fit la paix avec le roi de Sindhou qui, toujours d’après la légende, aurait eu cent femmes, tant hindoues que tibétaines.

Le royaume de Sindhou ne dura qu’un siècle et fut détruit à la fin du ixe siècle, sous le règne du fameux roi apostat Lan-Darma, par une première invasion tibétaine. Deux cents ans plus tard le Bhoutan aurait été de nouveau envahi par les soldats du roi Tiralchan (?) qui, d’après la seconde partie de son nom (khan), pourrait bien être un Mongol : ce serait dans ce cas un souvenir, légèrement antidaté, de la conquête du Tibet par Gengis-Khan, qui s’en empara en 1206.

  1. Une légende analogue sur le bâton fleuri du marabout Saada, éponyme de Bou-Saada, a été rapportée à la Société de Géographie d’Alger dans sa séance du 6 avril 1919.