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Canadiennes d’hier

« Si vous êtes pas contentes, mes petites filles, vous vous en gagnerez des plus beaux. Vous devriez avoir peur que le bon Dieu vous punisse d’être fièrepettes de même. »

Au couvent, les demoiselles du faubourg se moquent d’elles, naturellement. Mlle Germaine Babin fait bè bè bè chaque fois qu’elle les rencontre ; ça leur prend au cœur mais ne les empêche pas d’être à la tête de leur classe et Mlle Babin de traîner à la queue. C’est vers le milieu de juin qu’elles vont aller chercher leur diplôme. Deux institutrices de plus dans la famille ! Je me promets qu’elles vont rester un an ou deux à la maison pour nous soulager et apprendre à travailler. Elles sont trop jeunes d’abord et trop belles petites filles ensuite pour aller tenir une école au loin sans surveillance. Ce serait bien si c’était dans la paroisse : comme Imelda, y a pas de soin. Pour leur voyage à Québec, qui va se trouver dans les chaleurs, on leur fait venir des robes de crêpe de Chine du magasin Eaton sur catalogue, mais on leur dit pas d’avance. J’en aurai une moi aussi, ça va être ma robe des dimanches pour l’été qui vient ; c’est si bon marché que ça vaut pas la peine de s’en faire. Tu as besoin de piéter, ma chère, si tu veux être aussi chic que nous autres.

Maman m’a promis que j’irais au pèlerinage de la bonne sainte Anne avec Cajétan. Si tu voyais comme il a profité, cette année, notre petit gars, il est résolu pour son âge : fort comme un bœuf, smart, je te dis, pour conduire les chevaux et toujours au-devant, toujours prêt à rendre service

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