Page:Bonaparte - Un mois en Afrique, 1850.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée

moi-même je fus atteint d’un gros caillou, qui ayant rebondi sur ma carghera corse (ceinture à cartouches), ne me fit pas grand mal. Je restai seul d’officier.

L’œil au guet, le doigt sur la détente, j’attendais que quelque Arabe se montrât au-dessus du mur. Il en vint un qui, coiffé d’un turban, brandissait un pistolet de la main droite, s’appuyait sur la gauche, et se découvrait audacieusement jusqu’à la ceinture. En apercevant un officier qui le tenait en joue presque à bout portant, il dut penser que son heure était arrivée ; il voulut se rejeter en arrière, mais il n’en eut pas le temps ; je lui lâchai dans le cou, au-dessous du menton, mon coup droit chargé d’une balle et cinq chevrotines ; son coup du pistolet porta à faux sur ma gauche, sa tête frappa le mur qui fut baigné de son sang, et derrière lequel il disparut en tombant.

Presque en même temps, à quelques pas de là, un autre, à barbe grise, armé d’un long fusil garni d’argent, faisait basculer son arme sur le haut du mur, pour nous mieux viser. Se voyant visé à son tour, il se retira ; mais aussitôt, élevant les bras et son fusil, il allait tirer dans notre direction, quand je lui lâchai mon second coup, chargé à deux balles qui, écrêtant le mur, l’atteignirent à la tête dont on ne voyait que le sommet. Comme son camarade, il tomba de l’autre côté, ainsi que son fusil qui paraissait fort beau, et que nous ne pûmes prendre. Les tirailleurs applaudirent, et ils m’assurèrent que c’étaient des chefs.

Tout cela se passa, pour ainsi dire, en un clin d’œil, et beaucoup plus vite qu’on ne peut l’écrire. Cependant, le feu, au lieu de discontinuer, prenait une nouvelle intensité. En voyant tomber