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qu’ils se sont trompés ; dans aucun cas, la République n’aurait eu un soldat plus fidèle, comme elle l’aura encore, si elle était attaquée, bien que ce ne puisse plus être dans les rangs de l’armée.

M. le général Leflô avait été nommé rapporteur de ma pétition, mais nos nombreux travaux et les graves préoccupations du moment empêchèrent de la porter à l’ordre du jour. La Constituante fit place à la Législative, et ma position militaire resta la même. Ce moment, il faut en convenir, a été décisif dans ma vie, car si j’étais entré dans un régiment français, au lieu de me présenter aux nouvelles élections, j’aurais suivi mes penchants et je me serais exclusivement consacré à la carrière des armes. Quoi qu’il en soit, nommé dans l’Ardèche et en Corse, je revins siéger à l’Assemblée actuelle.

Ma position n’y était pas facile, ni agréable. D’un côté, je voyais une majorité composée de divers éléments, tous d’origine monarchiste, opposés par conséquent à mon principe, mais soutenant, quoiqu’en l’égarant, suivant moi, le pouvoir exécutif. De l’autre, une minorité, formée aussi de nuances diverses, moins hétérogènes, il est vrai ; minorité républicaine, révolutionnaire, réformatrice, humanitaire, demandant de grandes entreprises, mais ayant des chefs qui considéraient Louis-Napoléon comme un antagoniste, et qui eussent été contre lui, c’est mon opinion, quoi qu’il eût fait. Sans doute, je me sentais instinctivement entraîné vers la Montagne ; mais, à part ses antipathies individuelles, je pensais sincèrement qu’elle dépassait le but, et qu’elle compromettait la République, notamment en se rapprochant des hommes qui approuvaient le 15 mai et les journées de juin. Restait le tiers-parti,