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grâces et l’innocence, votre cœur pur et chaste palpite donc sous une main criminelle ? Femme respectable et infortunée ! Dans ces moments que la nature commande à l’amour, lorsqu’arrachés aux chimères de la vie, des plaisirs sans mélange se succèdent rapidement ; lorsque l’âme agrandie par le feu du sentiment, ne jouit que de faire jouir, ne sent que de faire sentir ; vous pressez contre votre cœur, vous vous identifiez à l’homme froid, à l’égoïste qui ne se démentit jamais, et qui, dans le cours de soixante ans, ne connut que les calculs de son intérêt, l’instinct de la destruction, l’oisiveté la plus infâme, les plaisirs, les vils plaisirs des sens !

Bientôt la cohue des honneurs, les lambris de l’opulence vont disparaître ; le mépris des hommes vous accablera. Chercherez-vous dans le sein de celui qui en est l’auteur une consolation indispensable à votre âme douce et aimante ? Chercherez-vous sur ses yeux des larmes pour mélanger aux vôtres ? Votre main défaillante, placée sur son sein, cherchera-t-elle à se retracer l’agitation du vôtre ? Hélas ! si vous lui surprenez des larmes, ce seront celles du remords. Si son sein s’agite, ce sera des convulsions du méchant qui meurt en abhorrant la nature, lui et la main qui le guide.

Ô Lameth ! ô Robespierre ! ô Pétion ! ô Volney ! ô Mirabeau ! ô Barnave ! ô Bailly ! ô La Fayette ! Voilà l’homme qui ose s’asseoir à côté de vous ! tout