Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme vol2.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 11 )

rade, je ne pus ſoutenir le libre aveu de l’indifférence de Murville, & de ſes vues intéreſſées en m’épouſant. Ce ſont donc mes fatales richeſſes qui m’ont perdue, m’écriai-je ! ſans elles, je n’aurois pas eu le malheur d’attirer vos regards, & de vous être ſacrifiée… Que je les déteſte ! puiſqu’elles m’ont liée à un perfide que je dois haïr, qui m’en a toujours impoſé ſur ſes ſentiments… dont je rougis d’avoir été la dupe.

Quel mal cela vous a-t-il fait ? qu’importe que vous ayez cru ce qui n’étoit pas, puiſque vous avez joui d’une illuſion équivalente à la réalité ? C’eſt moi qui devrois me plaindre du rôle forcé que j’ai fait auprès de vous… Soyons de bon compte ſur nos droits ; vous n’en aviez point pour exiger ma tendreſſe, puiſque la vôtre étoit placée ailleurs. Je me ſuis rendu aſſez de juſtice pour ne pas m’arroger celui de perſécuter votre amour pour le Comte : nous devons être but à but. Mais qu’eſt-ce, interrompit-il, malgré l’évidence de la raiſon, je vous vois toujours prête à tomber dans les convulſions de l’emportement ? Cela étoit vrai ; je trouvois tant de choſes à repliquer ; je me retenois avec tant d’effort, que j’en étois dans une continuelle agitation.

Modérez-vous, reprit-il, & tâchez de