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ment je m’en tirerai, diſoit-elle : la contrainte me révolte ; je hais le petit Marquis, cependant… Cependant vous lui donnerez Mademoiſelle de Tournemont, ajoutai-je, & toutes mes eſpérances ſeront détruites ? J’ai peine à croire que je me laiſſe réduire à cette néceſſité, reprit-elle… En tout cas, il n’en ſeroit ni plus, ni moins pour votre fortune, puiſqu’il me reſtera une fille. Ce ſera, je l’avoue, un mince préſent, quant au perſonnel : nul uſage du monde, peu de beauté ; de la roideur dans le caractère ; de la ſingularité dans l’eſprit… J’ai négligé ſon éducation, pour ne pas ajouter la vanité des talents à ſon orgueil naturel, & parce que je la deſtinois à quelque Noble de Province, dont elle auroit parfaitement ſécondé la morgue… Vous ne l’aimerez point, c’eſt égal, vous ſerez riche.

L’incertitude de votre mere, ne m’en laiſſa point. Je tins pour aſſuré que vous épouſeriez le Marquis, & que Mademoiſelle d’Aulnai ſeroit mon lot. Prévenu comme je l’étois, l’idée de me marier avec elle ne m’inſpiroit aucune envie de la connoître… Ma viſite au Couvent de *** fut le pur effet du hazard : vous ſavez ce qui s’enſuivit. Je devins réellement amoureux. Votre ſœur me fit parcourir un pays nouveau pour moi :