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Cette explication rectifia mes idées, tranquilliſa ma vanité ; & l’amour m’aveuglant ſur mes forces, je promis, de bonne foi, tout ce que le Comte deſiroit.

Rien au commencement ne me fut plus aiſé que d’obſerver ma parole… J’allai même au delà, & portai l’engouement juſqu’à chérir la retraite, juſqu’à négliger le ſoin de plaire à tout autre qu’à mon mari.

Il n’étoit pas poſſible que je me ſoutinſſe au degré où j’étois montée, j’y chancelois, j’étois prête d’en tomber, quand les annonces d’une groſſeſſe m’autoriſerent à quelques petits relâchements, qui furent ſuivis de mille autres… J’eus de l’humeur, des vapeurs, des fantaiſies. Loin de ſe plaindre, le Comte reſpectoit mon état, m’en aimoit davantage, & ajoutoit à ſes attentions tout ce que je retranchois aux miennes.

A la fin de l’année, je devins mere d’une fille : ce titre me coûta près de trois mois de langueurs, d’incommodités, ſinon dangereuſes, au moins fort pénibles. C’étoit plus que jamais le temps de l’indulgence ; Rozane ne mit point de bornes à la ſienne : j’en abuſai tellement, qu’au retour de ma ſanté, j’étois comme un enfant bien gâté, bien mutin, qui ne prendroit pour regle que ſon caprice.

Le Comte n’ayant plus les mêmes raiſons