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riage, que pour venir aſſiſter à ſa priſe d’habit.

Il eſt bien ſingulier, dis-je, qu’un tel événement ne m’ait pas été connu plutôt ! Perſonne n’en étoit donc informé ? — Vos parents le ſavoient ; mais tous ſe ſont impoſé ſilence par ménagement pour votre ſituation ; enſuite pour ne point troubler les fêtes qui vous attendoient au retour du Baron. Etoit-il dans la confidence, demandai-je encore ? Au-lieu de me répondre, Madame de Rozane me fit remarquer un joli meuble ſur la boutique d’un Tabletier, & m’entretint, juſqu’au Couvent, de ſemblables bagatelles.

Malgré la diſpoſition dont je me ſuis accuſée, ma ſœur étoit ſi maigre, ſi pâle, ſi changée, que je ne pus la voir ſans que mon cœur ſe ſerrât, & que mes larmes fuſſent prêtes à couler. Quelle métamorphoſe ! lui dis-je, il n’y a pas une heure que j’en ſuis inſtruite, & j’héſite même à la croire en la voyant. Pourquoi tant s’étonner ? dit-elle ; vous n’ignorez pas que le cœur humain eſt ſujet à d’étranges variations. Je ſentis le piquant de ce trait, il me fit rougir. Ma mere, qui s’apperçut que j’en avois été bleſſée, entama une autre matiere ; bientôt la converſation tomba. Je ne diſois mot ; ma ſœur preſque rien ; Madame de Rozane n’avan-