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n’avez pas jugé M. de Murville digne de vous ; & ſi vous ne vous y déterminez de bonne grace, je ſaurai vous contraindre à m’obéir ſans retardement. C’en eſt donc fait ! m’écriai-je en me relevant a demi, ma mere eſt inexorable… Il ne me reſte plus qu’à mourir ! Voilà des lieux communs pitoyables ! reprit-elle… Mademoiſelle, on ne meurt point pour immoler ſes goûts à ſon devoir ; j’en ai fourni la preuve en épouſant votre pere. Au moins, dis-je, vous ne le haïſſiez pas ? — Non… A ce mot elle s’éloigna, ouvrit le cabinet, le referma, revint ſur ſes pas en me regardant attentivement.

J’étois toujours ſur le parquet, noyée dans mes larmes… Quel état ! dit-elle : que vous devriez en être humiliée !… Vous êtes une étrange créature !… Tenez, cette ridicule comédie ne ſauroit me ſéduire. Vous multiplieriez inutilement les ſcenes d’extravagance : ainſi je vous conseille, pour vous-même, de vous tirer delà, en prenant un parti raiſonnable… Je continuai de gémir, ſans répondre. Ma mere ſe tut, ſe recueillit, comme pour délibérer avec elle-même… Si je ne conſultois que ce qui vous eſt dû, reprit-elle, je ne me relâcherois jamais de ce que j’ai avancé ; mais j’ai des entrailles : je ne réſiſte point à leur mouvement, & veux bien encore vous laiſſer maî-