Page:Boiteau - Légendes pour les enfants (Hachette 1861).djvu/75

Cette page n’a pas encore été corrigée

plus une fête, ce n’est pas même une débauche, c’est un supplice que Dagobert inflige à ses amis. Saint Éloi et saint Ouen se promènent avec anxiété à l’un des bouts de la salle ; leur visage est empreint d’un sentiment de tristesse extraordinaire. Autour du roi cinq ou six leudes à peine font mine de comprendre ce qu’ils font, de parler, de chanter et de choquer des verres vides. Le vin ruisselle sur la table. Dagobert lui-même ferme déjà les yeux. Judicaël frémit de colère et d’indignation sur son siége reculé.

L’air est comme chargé de vapeurs pesantes.

« Qu’on ouvre les fenêtres, dit le roi en balbutiant ; qu’on les ouvre, ou nous périrons étouffés. » Les fenêtres sont ouvertes ; mais quel spectacle ! De toutes parts le ciel est envahi par des nuages noirs ; on dirait qu’un voile épais en cache la figure ; des torrents de pluie tombent, comme des cascades, sur toute la campagne. Les vents hurlent dans les bois ; les ruisseaux, débordés, heurtent les arbres et les renversent ; le ciel noir est à chaque instant traversé par les flèches rapides de la foudre. Un bruit de tonnerre formidable et incessant domine tous ces fracas. Jamais plus horrible tempête n’est venue fondre sur la terre ; il est impossible qu’on tienne ses yeux ouverts en face de ces éclairs qui les pénètrent et les déchirent.

Dagobert et les siens se réveillent ; l’effroi a chassé