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SIGISMOND.

Ce discours me remplit d’une clarté nouvelle ;
J’en sens toute la force & la sublimité :
Mon esprit qui n’est plus séduit par l’apparence,
Des humaines grandeurs connoît la vanité,
Pour elles, il n’a plus que de l’indifférence,
L’amour, le seul amour dont il est agité,
Lui fait sentir sa véhémence,
Il entraîne ma volonté ;
Et quoique d’un vain songe il tienne la naissance,
J’éprouve que sa flamme est une vérité.

CLOTALDE.

Sortez d’erreur ; ces feux remplis de violence,
À vos sens abusés doivent tout leur pouvoir ;
Ils n’offrent à vos yeux qu’un objet chimérique,
Comme tous ces honneurs, cette cour magnifique,
Et tous ces vains trésors que vous avez crû voir ;
Et, pour en triompher, vous n’avez qu’à vouloir.

SIGISMOND.

Pour l’éteindre jamais, ma flamme m’est trop chere ;
Ma raison qui me fait sentir la fausseté
De ma grandeur imaginaire
Peut adoucir ma cruauté,
Réduire mon orgueil, enchaîner ma colere ;
Mais elle ne sauroit étouffer mon ardeur ;
Je sens qu’elle est plûtôt du parti de mon cœur.