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Scène XIII

SOPHRONIE, seule.

Ah ! Plutôt que ta barbarie
Prive ton fils du pouvoir souverain,
Et qu’un hymen funeste à Fédéric me lie,
Il faudra, roi cruel, que tu perces mon sein,
Ou qu’avec Sigismond tu me rendes captive.
En faveur de ce fils dont je fais le malheur,
Et pour qui je ressens la pitié la plus vive,
Il n’est rien qu’en ta cour ne tente ma douleur.
Quand je songe, grands dieux ! que ce prince qui m’aime,
Va rentrer dans la nuit de son affreuse tour,
Je ne suis plus maîtresse de moi-même,
Et la part que je prends à sa disgrâce extrême,
Me fait sentir que je l’aime à mon tour.
Ma fierté s’en émeut : mais ce feu qui l’étonne
N’a rien qui blesse la vertu ;
Et dans l’affreux péril dont mon ame frissonne,
Il est trop alarmé pour être combattu :
À son ardeur je m’abandonne.
J’armerai tout l’état contre un pere inhumain.