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C’est pour m’avoir caché jusqu’ici mon vainqueur,
Et ne m’avoir pas fait plus digne de lui plaire.

SOPHRONIE.

Seigneur, un tel accueil a lieu de m’étonner.
J’ai crû ne voir en vous qu’un ennemi terrible,
Que contre tous les siens doivent trop indigner
Vingt ans d’une prison horrible.

SIGISMOND.

Après vous avoir vûe, ah ! peut-on vous haïr ?
Des injustes tourmens que l’on m’a fait souffrir,
Vous n’êtes point d’ailleurs coupable ;
Et quand vous en seriez l’auteur,
Le ciel vous forma trop aimable,
Pour ne pas triompher de toute ma fureur.
Il n’est rien que vos yeux ne rendent excusable.

SOPHRONIE.

Vous redoublez ma surprise, Seigneur.
Quoi, vous me connoissez, vous me parlez à peine,
Et vous me faites voir les feux les plus ardens ?

SIGISMOND.

Je ne sai, mais enfin voilà ce que je sens :
Tel est l’effet subit de l’amour qui m’entraîne ;
Du cœur de votre prince il vous rend souveraine,
De la Pologne en même temps ;
Charmante Sophronie, il vous déclare reine :
Le trône est votre rang, vous l’avez mérité,