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ULRIC.

Le supplice m’étonne autant que la victime.

LE ROI.

Je crûs, par-là, du ciel détourner la fureur,
Assurer mon repos & celui de l’empire.
Vaines précautions ! Le remords, dans mon cœur,
Punit à chaque instant l’excès de ma rigueur ;
Je sens sur-tout, je sens qu’il me déchire
Dans ce jour où l’État soupire
Après le choix d’un successeur
Que les ans me pressent d’élire.
Contre moi la raison elle-même conspire,
Me dit que j’ai trop crû les astres incertains ;
Que je dois révoquer des ordres inhumains,
Qui, me privant d’un fils, ôtent à la province,
Contre toute équité, son véritable prince ;
Qu’avant de condamner l’espoir de ma maison
À l’horreur éternelle
D’une rigoureuse prison,
Je consulte du moins l’amitié paternelle,
Et tente s’il n’est point, en cette extrêmité,
Quelque moyen plus doux pour dompter sa fierté,
Et pour faire mentir son étoile cruelle.

ULRIC.

Ah ! seigneur, pour ce fils proscrit contre les lois,
D’un trop juste remords daignez oüir la voix.