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Le Marquis.

Le temps et vos leçons l’apprendront à penser.

Le Baron.

Non, il n’est pas possible, et j’y dois renoncer.
Auprès d’elle il n’est rien que n’ait tenté ma flamme ;
Tous mes efforts n’ont pu développer son âme.
Trompé par le désir, mon amour espéroit
Qu’au sortir du couvent elle se formeroit.
Près d’être son époux, et brûlant de lui plaire,
Je l’ai prise chez moi, de l’aveu de son père ;
Elle est avec ma sœur, qui seconde mes soins.
Mais, inutile peine ! elle en avance moins ;
Son esprit chaque jour s’affoiblit, loin de croître.
Je la trouvois encor moins sotte dans le cloître :
Elle montroit alors un peu plus d’enjouement,
De petites lueurs perçoient même souvent ;
Elle répondoit juste à ce qu’on vouloit dire,
Et quelquefois du moins on la voyoit sourire.
À peine maintenant puis-je en tirer deux mots,
Un non, un oui, placés encor mal à propos.
À sa stupidité chaque moment ajoute :
Son âme n’entend rien, quand son oreille écoute.
Jugez présentement si mon bonheur est pur,
Et de mes sentiments si je puis être sûr.

Le Marquis.

Tous les biens sont mêlés, et chacun a sa peine.

Le Baron.

Il n’en est point qui soit comparable à la mienne.
Pour cet objet fatal je passe tour à tour,