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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

ses cours d’eau et de ses chemins creux. Je me sens pour mon parc un patriotisme tout particulier qui fait un peu tort à celui que je devrais avoir pour la grande patrie.

Je te dis tout cela, chère sœur, comme dans ce beau jadis, quand moi, l’aînée, je te versais si volontiers mes folles confessions pour recevoir de toi, la cadette, de bonnes morales, bien fermes et bien douces. Je prête souvent l’oreille, comme pour entendre ta voix, et quelquefois je crois que c’est d’elle que me viennent certaines pensées que je voudrais conserver pour m’en fortifier. Comme tu le dis, c’est l’heure d’être attentifs, et devant cette menace immense qui s’apprête à nous envelopper, quand tout ce qu’on croyait fort a croulé, on se prend à désirer sentir quelque chose de solide à quoi s’appuyer, quelque chose qui ne s’effondre pas comme tout le reste.

Voici qu’il faut te dire adieu.

Compte sur nous pour André, et dis-nous bien vite comment vous a laissés le premier flot prussien.