Page:Boissonnas, Une famille pendant la guerre, 1873.djvu/290

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

274
UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

et la pensée que ce silence peut cacher un deuil semblable est devenue un atroce cauchemar.

Ma femme bien-aimée, André, Berthe, Marguerite, Robert, me serez-vous tous rendus ? et quand ?

Du même à la même.
Paris, 6 janvier.

Hier, la journée des assiégés avait bien commencé, malgré dix degrés de froid. Quelques numéros du Moniteur prussien, journal officiel de Seine-et-Oise, avaient pénétré jusqu’à nous et nous leur avions dû un aperçu de l’état des choses hors de notre prison qui nous avait fait quelque bien. Ce n’est pas que ces journaux renfermassent de bonnes nouvelles, mais ils n’en donnaient point de mauvaises, et c’était beaucoup. Il semble ne s’être rien passé d’important sur la Loire, pas de nouvelles de ce redoutable Frédéric-Charles ; mais des témoignages que la résistance de la province s’est accentuée, voilà qui avait suffi à nous donner une lueur d’espérance. Tu vois que nous ne sommes pas gâtés ! Il faut peu de chose pour réjouir des assiégés qui s’imaginent parfois qu’au delà de l’enceinte de leur prison, tout s’est écroulé.

Le soir, les rapports constataient un redoublement