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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

plir. D’ailleurs, je puis encore être bon à quelque chose, il y a certains services que je puis rendre. Avec l’approbation de ta mère, qui fait peut-être à ton frère Maurice plus encore qu’à la patrie le sacrifice de ma personne (pauvre papa ! il essayait en vain d’égayer maman), avec l’approbation de ta mère, je viens d’envoyer un télégramme au général Ch.-L… pour me mettre à sa disposition. Je pense qu’on m’emploiera aux fortifications ; cela me rapprochera aussi de Maurice, que sa qualité de polytechnicien désigne à un service du même genre. Le père et le fils aîné seront donc à Paris et assiégés !!! Le second fils, maître André, est à cette heure au Mans occupé à faire l’exercice ; il continuera son apprentissage militaire. Il reste vous, mère, enfants, et c’est vous qu’il s’agit de mettre en sûreté. Je souhaiterais que ta mère m’ôtât tout souci sur votre sort en fuyant, — le mot est laid, mais le fait est justifiable lorsqu’il s’agit de femmes et d’enfants, — d’abord si vous voulez à Brou, chez votre tante de Thieulin ; puis, si l’ennemi avançait, à Tours, en Bretagne, si loin qu’il faudrait pour l’éviter. Ta mère, au lieu de cela, veut…

— Je ne veux rien, a interrompu maman, mais il nous faut réfléchir et chercher le mieux sans nous trop laisser entraîner par nos propres désirs. Nous pouvons fuir, il est vrai, et quelques autres habitants du pays feront de même ; mais combien vont

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