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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

ne sais quoi m’empêche d’espérer. Selon toutes probabilités, il était de cette dernière affaire ; je me figure trop bien ce qu’elle a pu être ; je devine comment André aura usé de lui-même ; d’ailleurs il se trouvait un vieux soldat par comparaison, et il devait payer de sa personne. C’est une agonie que les pensées qui surgissent. Il faut espérer que toi, du moins, tu sais tout ce que j’ignore.

Maurice me montre toujours mieux quel tendre et fidèle cœur il a. Nous étions trop heureux par nos enfants !

Du même à la même.
Paris, 9 décembre.

Rien de nouveau, sinon qu’il neige depuis deux jours.

C’est grand’pitié de voir par ce temps les longues files de femmes qui attendent dès quatre heures du matin aux boucheries ou bien aux cantines. Elles s’abritent de leur mieux sous de vieux parapluies ou des lambeaux d’étoffes, et malgré cela le froid fait claquer leurs dents. Qu’ils sont décolorés, les visages qu’on aperçoit sous leurs capuchons ! Et tous les jours elles reprennent cette longue attente si mal récompensée par une portion qui n’est souvent,