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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

Enfin avec mille peines et beaucoup d’argent nous avons collectionné à peu près le nécessaire. Je dis collectionné, car il nous a fallu aller de maison en maison découvrir ce qui nous pouvait servir, puis décider les propriétaires à s’en séparer. Au fond la confiance en la victoire de nos troupes n’est pas complète, certaines gens préfèrent se sentir quelque argent en poche, à garder du linge ou des vivres faciles à piller par les Allemands ; mais on n’est pas Beauceron pour rien, et quand on fait le commerce c’est toujours du commerce. Enfin nous avons glané de quoi charger une charrette, et les grandes pièces vides du Bocage n’ont plus autant l’air désolé.

Même jour, dix heures du soir.

Voici le petit docteur à qui j’avais demandé de venir inspecter nos arrangements, qui arrive rayonnant. « Notre gauche a complètement enfoncé l’ennemi. Et il y a mieux encore : grande victoire sous Paris, le général Ducrot a percé les lignes ennemies, il marche vers l’armée de la Loire ! La nouvelle arrive à l’instant, de Tours, au général même, elle est positive. »

Que Dieu soit mille fois béni ! Que ce serait beau, la France sauvée et nous aussi !