coups dans la direction de Chartres. Nous sommes allés tous trois aux nouvelles jusqu’au village. D’ailleurs il fallait absolument nous approvisionner si cela était encore possible, et nous mettre en mesure d’être bons à quelque chose.
Avant de partir, nous avons jonché les chambres de matelas, et étendu en guise de draps absents les rideaux d’été dont, par bonheur, la provision est restée intacte ; mais nous n’avions pas de couvertures, pas de linges à pansement, aucun cordial, pas de viande, à peine du bois, et le froid est intense. Nous nous serions reproché ce dénûment si des blessés nous étaient arrivés. Nous avons trouvé Chevilly encombré, beaucoup de voitures, encore plus de soldats semblant flâner. On disait que nous avions l’avantage, mais je soupçonne fort les donneurs de nouvelles de n’en pas savoir grand’chose.
Quoi qu’il en soit, cela modifie toutes les idées qu’on s’était fait de la guerre, de voir comment elle se pratique. On compte, dit-on, balayer demain la route de Chartres ; n’y a-t-il rien à faire pour cela dès aujourd’hui ? Et puis ce canon qui tonne encore par moments, n’est-ce pas le cas d’y courir ? Point du tout. Ce monde militaire a l’air de vivre de ses rentes. On fume, on se chauffe, on boit. Adolphe assure que cela ne peut se passer autrement, que chacun attend son tour. Je le veux bien, mais au moins chacun devrait-il avoir un peu plus l’air de songer à ce qui se passe.