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UNE FAMILLE PENDANT LA GUERRE.

sang que l’on ferait verser ne nous sauverait pas ; — à quoi bon alors ?

Du même à la même.
Paris, 2 novembre.

Je ne vaux pas mieux que les autres, ma chère femme, et quoique je me doute bien que c’est là une vérité connue de toi, j’en consigne l’aveu, c’est toujours un signe d’humilité. Ce repentir me prend au souvenir de quelque chose que j’ai du t’écrire le 31 en apprenant cette capitulation de Metz. Je crois que je n’ai pas su dominer mes impressions et que tu m’auras vu très-malheureux. Malheureux, je l’étais et je le resterai, car ces douleurs-là ne s’effacent pas ; mais je ne devais être ni amer ni découragé.

Nous avons remarqué bien des fois ensemble que, quand une grande épreuve frappe une famille, quand on perd un enfant, par exemple, il y a du désespoir dans la première douleur. Il semble aux parents que toute leur joie est partie avec cet enfant-là, et qu’il ne leur reste plus rien. Très-souvent alors, Dieu qui les trouve ingrats les menace de nouveau, un autre enfant tombe malade, et ils s’aperçoivent à l’inten-

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