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Un Vaincu.

âgé, laborieux et simple, avait souvent pris part aux troubles que suscitaient tour à tour les partis opposés. Abolitionniste convaincu, passionné, John Brown[1] s’exalta par la lutte, et il en arriva à se croire appelé à devenir le libérateur des noirs. Il oublia que tout progrès fondé sur la violence, obtenu en dehors des lois, est autre chose qu’un progrès ; il crut qu’un soulèvement général des nègres hâterait les temps et mènerait immédiatement au but que les moyens légaux ne permettraient pas d’atteindre de longtemps.

D’abord il noua des intelligences avec quelques esclaves réfugiés au Canada, puis s’efforça de trouver des appuis dans les principaux États. Enfin, au mois d’octobre 1859, il se crut assez fort pour soulever la population noire de la Virginie.

À la tête de seize blancs et de cinq nègres, John Brown surprit aisément, tant on était loin de tout soupçon, l’arsenal fédéral et la fabrique

  1. On se souvient peut-être qu’un dessin représentant le gibet de John Brown et signé Victor Hugo, a été longtemps exposé dans les rues de Paris.